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Les oeuvres réunies dans cette exposition ont en commun l'évocation du merveilleux par une tentative de réinvestissement de ses formes, déjà exploitées et parfois surexploitées par les médias, la littérature, le cinéma... Loin de fonctionner de manière illusionniste, les oeuvres présentées dans cette exposition mènent des vies multiples ; traversées de l'esprit du romantisme, mais aussi de son funeste devenir, elles cherchent à fonctionner par delà le faisceau de références qu'elles condensent, dans leur propre condition, comme des tentatives de réappropriation d'un enchantement évanoui.
La dernière décennie a vu le champ de l'art contemporain largement occupé par des oeuvres sous-tendues par des problématiques politiques ou sociales. Parallèlement ont émergé de nombreuses oeuvres, qui rejouent avec plus ou moins de distance, les idéaux romantiques et leur cortège de figures merveilleuses et fantastiques. Si l'on peut détecter là une aspiration à re-poétiser le monde, voire à fuir le monde traité par les oeuvres précédemment citées, il convient de s'interroger sur les modalités de cette résurgence. L'émergence du romantisme, dès le début du 19ème siècle, s'était développé dans un contexte de désillusion liée à l'industrialisation et aux guerres, et un parallèle s'établit naturellement avec la situation actuelle.
Ces oeuvres ont en commun une affinité avec l'esprit du romantisme et les motifs qui en sont issus. Le romantisme est probablement le mouvement artistique et intellectuel à avoir pénétré le plus largement les esprits, et son interprétation a dérivé tout autant pour se refléter abondamment dans un imaginaire populaire. La prolifération des contes notamment, a donné lieu à une grande variété de motifs et de personnages merveilleux.
A l'heure actuelle, ces motifs perdurent dans certaines célébrations populaires où l'idéal féminin n'est pas très éloigné de celui des princesses et des châteaux enchantés. On les retrouve aussi dans la publicité, où un prétendu merveilleux fait rage pour transcender et vendre les objets de consommation les plus courants. L'imaginaire poétique initial se fait instrument d'une société marchande où le rêve lui-même pourrait être en passe de devenir l'objet ultime de la nostalgie.
Les photomontages de Marnie Weber sont extraits d'une série intitulée "Spirit Girls, Songs That Never Dies", où l'artiste elle-même se met en scène, multipliée et largement accessoirisée, accompagnée de divers personnages jouant des rôles le plus souvent féminins : sirènes et pirates autour d'un vaisseau fantôme, de lutines dans une forêt enchantée quelque peu désolée, ou encore, femmes fleurs dans celui d'Ophélie. Le personnage d'Ophélie est probablement emblématique de la prédominance du thème féminin qui traverse l'oeuvre de Marnie Weber ; Ophélie la suicidée est l'essence même du destin tragique de la femme, présentée comme la victime impuissante des pouvoirs masculins qui se jouent autour d'elle, "née pour mourir dans l'eau", comme le souligne Bachelard, qui précise plus loin que "l'eau est le symbole profond, organique de la femme qui ne sait que pleurer ses peines, et dont les yeux sont si facilement noyés de larmes". Si les images de Marnie Weber ont une remarquable qualité picturale, leur facture relativement bricolée du fait de la superposition d'images issues de diverses techniques - et a fortiori de techniques relativement obsolètes comme le Super8 - et la présence de l'auteur dans l'image, semblent indiquer la recherche d'une appropriation toute personnelle de leur objet. La rêverie dont elles sont les rémanences apparaît sous un jour moins illusionniste, et caractérisé avant tout par leur forte personnalisation.
Les sculptures de Thomas Grünfeld, réalisées en taxidermie, fonctionnent comme une intrusion dans le réel de créatures fantastiques. Collages de parties d'animaux, ces oeuvres maintiennent des proportions et une attitude familières, et le sentiment d'étrangeté qui s'en dégage n'intervient que dans un second temps. Ces créatures évoquent les cabinets de curiosités et l'imaginaire de la forêt, des contes et de leurs monstres ambigus, porteurs de valeurs à la fois positives et négatives. Leur réalisation, leur tangibilité à l'état de sculpture vient questionner le devenir du fantastique et laissent entrevoir la possibilité - on pensera alors aux manipulations génétiques - de la réalisation de telles créatures. Lorsque le rêve prend forme, ce serait alors sous celle du cauchemar et du monstrueux.
Les chars de parade dans la vallée de Pasadena, les collectes de bois aux formes bizarres dans le Michigan ou la culture suisse, pays dans lequel elle s'est installée, sont quelques un des thèmes dont s'empare Amy O'Neill. Cette artiste américaine emprunte aux formes de la culture folklorique pour souligner leur statut de monument. Si la culture folklorique appartenait au peuple, et lui était destinée, elle s'est vue peu à peu se figer pour servir des desseins autres, et échapper à ses auteurs pour faire une apparition massive dans les stratégies de la consommation de masse. Les pièces présentées à la Synagogue de Delme sont des fragments de sa série "Cimetière des chars de parade" en référence à la tradition vivace dans les années 60 de défilés de chars lourdement ornementés. Ici une rose ou une couronne, comme des portes-bonheur égarés, qui auraient perdu leur capacité au rêve pour endosser une toute autre réalité.
Sophie Bueno-Boutellier et Vydia Gastaldon ont en commun une pratique intensive du dessin et une utilisation pour l'une des techniques de tapisseries, pour l'autre de celles de la couture, du tricot et de la broderie, techniques fortement connotées "ouvrages de dames", mais ici utilisées dans un esprit qui n'est pas très éloigné des années 70. L'arc-en-ciel, traditionnellement associé à la joie et la gaieté, censé relier Dieu à l'humanité, fait l'objet d'un ultime recyclage par Sophie Bueno-Boutellier. Ainsi présenté usé, en déliquescence, dans un matériau mou à l'opposé de toute légèreté, le symbole semble désigner un renversement de situation.
L'univers de Vidya Gastaldon reste investi de valeurs positives, qui mêlent à la fois la contre culture des années 60 et 70, et des inspirations scientifiques, religieuses et mystiques. En résulte un univers très personnel, étrange et poétique, peuplé d'installations au sol, de sculptures textiles et de nombreux dessins.
Les matériaux doux et colorés, comme la laine, la mousse et le feutre sont utilisés pour construire des paysages miniaturisés qui fonctionnent comme de véritables microcosmes. Une relation quasi fétichiste semble pouvoir s'établir du fait de leur réalisation manuelle, et du temps visible de leur réalisation. Les motifs récurrents de ce monde volontiers onirique proviennent d'un imaginaire de la fertilité et de la vitalité : matrices, oeufs, rhizomes, champignons, coeurs, vaisseaux sanguins et plantes y prolifèrent. Si le traitement en textile confère à ces oeuvres un certain statisme, y demeure néanmoins ce temps probable de l'éclosion ou de l'accomplissement, indéterminé et oscillant immanquablement entre menace et épanouissement.
MARNIE WEBER
Les photomontages de Marnie Weber sont extraits d’une série intitulée “ Spirit Girls, Songs That Never Dies ”, où l’artiste elle-même se met en scène, multipliée et largement accessoirisée, accompagnée de divers personnages jouant des rôles le plus souvent féminins : sirènes et pirates autour d’un vaisseau fantôme, de lutines dans une forêt enchantée quelque peu désolée, ou encore, femmes fleurs dans celui d’Ophélie. Le personnage d’Ophélie est probablement emblématique de la prédominance du thème féminin qui traverse l’oeuvre de Marnie Weber ; Ophélie la suicidée est l’essence même du destin tragique de la femme, présentée comme la victime impuissante des pouvoirs masculins qui se jouent autour d’elle, “ née pour mourir dans l’eau ”, comme le souligne Bachelard, qui précise plus loin que “l’eau est le symbole profond, organique de la femme qui ne sait que pleurer ses peines, et dont les yeux sont si facilement « noyés de larmes » ”. Si les images de Marnie Weber ont une remarquable qualité picturale, leur facture relativement bricolée du fait de la superposition d’images issues de diverses techniques – et a fortiori de techniques relativement obsolètes comme le Super 8 – et la présence de l’auteur dans l’image, semblent indiquer la recherche d’une appropriation toute personnelle de leur objet. La rêverie dont elles sont les rémanences apparaît sous un jour moins illusionniste, et caractérisé avant tout par leur forte personnalisation.
THOMAS GRÜNFELD
Les sculptures de Thomas Grünfeld, réalisées en taxidermie, fonctionnent comme une intrusion dans le réel de créatures fantastiques. Collages de parties d’animaux, ces oeuvres maintiennent des proportions et une attitude familières, et le sentiment d’étrangeté qui s’en dégage n’intervient que dans un second temps. Ces créatures évoquent les cabinets de curiosités et l’imaginaire de la forêt, des contes et de leurs monstres ambigus, porteurs de valeurs à la fois positives et négatives. Leur réalisation, leur tangibilité à l’état de sculpture vient questionner le devenir du fantastique et laissent entrevoir la possibilité – on pensera alors aux manipulations génétiques – de la réalisation de telles créatures. Lorsque le rêve prend forme, ce serait alors sous celle du cauchemar et du monstrueux.
AMY O’NEILL
Les chars de parade dans la vallée de Pasadena, les collectes de bois aux formes bizarres dans le Michigan ou la culture suisse, pays dans lequel elle s’est installée, sont quelques un des thèmes dont s’empare Amy O’Neill. Cette artiste américaine emprunte aux formes de la culture folklorique pour souligner leur statut de monument. Si la culture folklorique appartenait au peuple, et lui était destinée, elle s’est vue peu à peu se figer pour servir des desseins autres, et échapper à ses auteurs pour faire une apparition massive dans les stratégies de la consommation de masse. Les pièces présentées à la Synagogue de Delme sont des fragments de sa série “Cimetière des chars de parade“ en référence à la tradition vivace dans les années 60 de défilés de chars lourdement ornementés. Ici une rose ou une couronne, comme des portesbonheur égarés, qui auraient perdu leur capacité au rêve pour endosser une toute autre réalité.
SOPHIE BUENO-BOUTELLIER
Sophie Bueno-Boutellier et Vidya Gastaldon ont en commun une pratique intensive du dessin et une utilisation pour l’une des techniques de tapisseries, pour l’autre de celles de la couture, du tricot et de la broderie, techniques fortement connotées « ouvrages de dames », mais ici utilisées dans un esprit qui n’est pas très éloigné des années 70. L’arc-en-ciel, traditionnellement associé à la joie et la gaieté, censé relier Dieu à l’humanité, fait l’objet d’un ultime recyclage par Sophie Bueno-Boutellier. Ainsi présenté usé, en déliquescence, dans un matériau mou à l’opposé de toute légèreté, le symbole semble désigner un renversement de situation.
VIDYA GASTALDON
L’univers de Vidya Gastaldon reste investi de valeurs positives, qui mêlent à la fois la contre culture des années 60 et 70, et des inspirations scientifiques, religieuses et mystiques. En résulte un univers très personnel, étrange et poétique, peuplé d’installations au sol, de sculptures textiles et de nombreux dessins. Les matériaux doux et colorés, comme la laine, la mousse et le feutre sont utilisés pour construire des paysages miniaturisés qui fonctionnent comme de véritables microcosmes. Une relation quasi fétichiste semble pouvoir s’établir du fait de leur réalisation manuelle, et du temps visible de leur réalisation. Les motifs récurrents de ce monde volontiers onirique proviennent d’un imaginaire de la fertilité et de la vitalité : matrices, oeufs, rhizomes, champignons, coeurs, vaisseaux sanguins et plantes y prolifèrent. Si le traitement en textile confère à ces oeuvres un certain statisme, y demeure néanmoins ce temps probable de l’éclosion ou de l’accomplissement, indéterminé et oscillant immanquablement entre menace et épanouissement.