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Westalgie

HENRIKE NAUMANN

Du Jeudi 30 Juin au Dimanche 2 Octobre 2022


Puisant dans de nombreux domaines tels que les arts décoratifs, le design, la mode, le graphisme, la sculpture et la vidéo, Henrike Naumann compose des installations immersives, à la fois « period room»[1] et showroom, dans lesquelles les visiteurs sont invités à déambuler afin d’observer et apprécier les éléments assemblés. Ceux-ci sont activés par des récits inspirés de sa propre histoire, celle d’une jeune femme née en ex-RDA ayant vécu les mutations d’un pays marqué par la réunification et ses promesses non tenues, la propagation du néolibéralisme des années 90 et de la société de consommation dans un territoire bouleversé par un changement d’identité, sans y être vraiment préparé, ni accompagné. L’artiste s’intéresse à la face cachée de la réunification, celle de l’abandon d’une jeunesse sans repère, coïncidant avec la montée de l’extrême droite et la création de groupuscules néo-nazis, nationalistes.

Formée à l’architecture de décor de théâtre et de cinéma, l’artiste se fait fort de cette expérience pour mettre en scène une période de l’histoire du design européen bon marché, courant de la chute du mur de Berlin jusqu’au début des années 2000. Elle recherche activement des éléments de design et mobiliers domestiques (type Ikea®) chargés de cette histoire, sur Ebay® et autres brocantes, pour composer subtilement ses installations. Appliquant cette méthode, l’artiste présente ces objets assurément kitsch mais teintés d’une touche 90’s « cool », affichant une esthétique postmoderne - inspirée de Memphis ou Alessi -, porteuse d’une idéologie structurant le pouvoir alors en place : celle de l’occident capitaliste triomphant, de l’économie de marché et du « there is no alternative »[2] dont les négligences et les certitudes coïncident avec la montée des extrêmes droites, aujourd’hui bien présentes en Allemagne et ailleurs. Parce que ces objets meublant nos intérieurs pourraient aussi, selon l’artiste, diffuser des messages idéologiques, c’est sans animisme aucun qu’Henrike Naumann met ainsi en avant la propension du design intérieur à façonner l’inconscient collectif et à orienter les constructions culturelles et politiques des individus. Tout en questionnant la neutralité supposée de ces objets, elle cherche à comprendre les racines de la montée de la droite radicale en Allemagne de l’Est, mais aussi dans le reste de l’Allemagne et en Autriche.

L’artiste observe les activités politiques et le mythe d’un certain « âge d’or » patriotique des nostalgiques de l’ex-RDA, pour élaborer des uchronies[3] mettant en scène la manière dont ces populations auraient pu mener la politique sur leur territoire s’ils avaient été maîtres de leur futur et de leur souveraineté. Aussi, chaque projet de l’artiste lui donne l’occasion d’imaginer des scénarios européens alternatifs, modifiant les cartes et l’idéologie politique, dans le but d’examiner les risques et les potentiels dangers pouvant résulter de l’évolution d’une Europe encore et toujours fragile face aux aléas politiques, aux néo-fascismes et aux angoisses d’une culture peinant à reconnaître ses erreurs passées.

Principalement attaché à l’histoire allemande des dernières décennies, l’art de Henrike Naumann ne se limite pour autant pas aux frontières de son pays natal. Il tend à démontrer dans quelle mesure ce tournant historique a pu affecter, à plus large échelle, de nombreux pays occidentaux marqués par une même idéologie politique dominante issue, bien souvent, d’un système d’expansion et d’exploitation coloniale, dont les retombées mondiales sont toujours plus prégnantes aujourd’hui. À partir d’une histoire complexe et socialement troublée, Henrike Naumann parvient à créer des moments fédérateurs auxquels chacun peut se sentir concerné, grâce à un jeu sensuel et un goût prononcé pour les formes séduisantes et ludiques d’un design rétro, de même que l’utilisation des codes visuels de la mode, des cultures club et rave party, dont le style trouve aujourd’hui un regain d’intérêt. Le plaisir ressenti au contact de ses installations agit à la fois dans le sens d’une « inquiétante étrangeté » toute surréaliste, mais aussi par la diffusion d’une vitalité inédite grâce à leur beauté désuète et leurs formes généreuses, propice à une nouvelle génération de politiques progressistes et anti-fascistes œuvrant pour la construction de futurs plus épanouis. Associant urgence politique et plaisir esthétique, le travail de Henrike Naumann trouve le juste milieu d‘une pratique artistique visant à éduquer et transmettre, tout en permettant d’accéder à une certaine beauté, indispensable à notre présent.

À l’occasion de son exposition Westalgie au centre d’art contemporain – la synagogue de Delme, Henrike Naumann réactive l’installation Anschluss 90’ (2018) et l’adapte à l’histoire chaotique du territoire de Delme entre 1870 et 1945, lorsque la Moselle appartint périodiquement à l’Empire Allemand se déployant vers l’ouest. Anschluss 90’ fut initialement conçue pour être présentée en Autriche, un des premiers pays annexés à l’Allemagne nazie. Présentant un showroom du début des années 90, cette œuvre se veut le site d’un récit imaginant qu’après la réunification de la RFA et de la RDA, l’Autriche aurait elle aussi souhaité rejoindre la grande Allemagne. Mais au lieu de parades militaires comme en 1938, c’est une prolifération de grands magasins de design d’intérieur et une frénésie d’achats, en Autriche comme en RDA, qui auraient marqué cette réunification, alliant alors hédonisme chic, consommation kitsch et politique nationaliste radicale. Pour sa réitération dans la synagogue, l’artiste vient joindre l’ancien Gau Westmark[4] à cette effervescence unificatrice, ce territoire auquel appartenait la Moselle pendant l’occupation nazie de 1940 à 1945, alors que Delme était traversée par la Adolf Hitler Straße. Exposé sur une moquette représentant les cartes de ces différents territoires « annexés au début des années 90 », le showroom réactive sa fonction d’attraction et de séduction au rez-de-chaussée. Cette period room « 1990-2000 » inclut deux œuvres vidéos : Triangular Stories (Terror + Amnesia) (2012), vidéo à double canal, met en scène d’un côté un groupe de jeunes partant en vacances à Ibiza pour aller clubber au début des années 90 et de l’autre, de jeunes néonazis du même âge, fomentant une attaque terroriste. Issus de la même génération, ces personnages évoquent la jeunesse laissée pour compte de la RDA fraichement réunifiée, dans laquelle l’hédonisme des rave parties pouvait aisément côtoyer un militantisme néo-nazi. Das reich (2017) est un montage vidéo de type amateur, présentant les prétentions politiques du parti autoproclamé « Reichsbürger » (citoyens de l’Empire allemand), groupuscule nationaliste qui nie la légitimité de la République fédérale d’Allemagne, en déclarant que l’Empire allemand est toujours en activité. En montant à l’étage, les visiteurs peuvent observer d’un point de vue belligérant ces différents territoires, figés dans leur glissement d’un pays à l’autre, d’une idéologie à l’autre.

Alors que le territoire du Saulnois a été le témoin d’un vote massif pour l’extrême droite lors des dernières élections présidentielles, ou que des groupes néo-nazis allemands trouvent en Moselle les moyens de fêter l’anniversaire d’Adolf Hitler[5], Westalgie vient nous rappeler la permanence d’une profonde nostalgie pour des mythes nationalistes entretenus par tout un pan de la population occidentale sujet à de multiples angoisses. Elle atteste de l’urgence comme de la pertinence d’engagements artistiques œuvrant contre le retour du fascisme et de ses nouveaux dérivés.

 

 

[1] La « period room » est une convention muséographique consistant à reconstituer un espace historique dans la salle d'un musée –  cabinet de lecture, salon français du XVIIIe siècle, salon de musique, etc. - mélangeant peintures, sculptures, meubles, tapisseries et autres objets d’art. Ce mode de présentation met en scène la cohérence supposée d'une époque afin de permettre au public de l’imaginer. Très en vogue depuis le début du XIXe siècle, ces reconstitutions furent ensuite contestées en raison de leur caractère fictif et peu scientifique.

[2] Slogan politique couramment attribué à Margaret Thatcher signifiant que le marché, le capitalisme et la mondialisation sont des phénomènes nécessaires et bénéfiques et que tout régime qui prend une autre voie court à l'échec.

[3] Une uchronie est un récit d'évènements fictifs à partir d'un point de départ historique.

[4] Ou « District de la Marche de l'Ouest » est une subdivision administrative du Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP) mise en place en 1940 par le régime nazi et du IIIème Reich, en vigueur de 1940 à 1945, durant la Seconde Guerre mondiale. Composé de la Sarre, du Palatinat et de la Moselle, le Gau Westmark constitue l'un des quarante-trois Gaue de l'Allemagne nazie.

[5]  Entre 2014 et aujourd’hui, plusieurs évènements rassemblant de nombreux néo-nazis ont été recensés près de la frontière allemande à Lengelsheim, Volmunster, Walschbronn ou encore Sexey-aux-Forges, à l’occasion de concerts rock nazis ou de l’anniversaire de la naissance d’Adolf Hitler. Risquant des peines importantes en Allemagne, ces groupes préfèrent passer la frontière et organisent ces festivités en Alsace-Lorraine, la France étant plus permissive à leur encontre : https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/l-alsace-et-la-lorraine-eldorado-des-neo-nazis-allemands-1556891481

 

 

 

L'exposition bénéficie du soutien du Goethe Institut Nancy.

   

 

Le centre d’art contemporain – la synagogue de Delme et Henrike Naumann souhaitent remercier Esther Mikuszies ainsi que toute l’équipe du Goethe-Institut de Nancy ; l’équipe d’Henrike Naumann : Nick Mantilla et Carlo Bernhardt ; Jean Ast ; La médiathèque de Delme ; Guillaume Lemuhot  ; Solène Boissenot-Ordureau en stage sur le montage ; les employés communaux de Delme.

 

Suite à sa présentation au centre d'art contemporain - la synagogue de Delme, l’exposition Westalgie d’Henrike Naumann a été présentée à L’IKOB, Musée d’art contemporain d’Eupen en Belgique, du 21 janvier au 16 avril 2023.

Henrike Naumann (1984) vit et travaille à Berlin. Elle est diplômée de la Hochschule für Film und Fernsehen de Potsdam-Babelsberg et de la Hochschule für Bildenden Künste de Dresde.

Son travail a été présenté lors d’expositions personnelles au Kunsthaus Dahlem ; au Belevedere 21, Vienne ; au Kunstverein, Hanovre; KOW, Berlin ; au Museum Abteiberg, Mönchengladbach ; au Musée d’art contemporain et Multimedia, Kinshasa ; à la Galerie Wedding, Berlin… de même que lors d’expositions collectives à la Tretyakov Gallery, Moscou ; au Pinchuk Art Center, Kiev ; à la Haus der Kulturen der Welt, Berlin ; à la Kunsthalle, Mannheim ; à la Biennale Mediacity, Séoul; au Kunstpalast, Düsseldorf ; au Kunstraum, Potsdam ; à la Schirn Kunsthalle, Frankfurt ; à la Kunsthalle, Brème ; à la Haus der Kunst, Munich ; au Maxim Gorki Theater, Berlin ; à la Kunsthalle, Düsseldorf ; au Kunstverein, Leipzig ; au Museum für Modern Kunst, Frankfurt ; au Kunstverein, Hambourg ; à la Biennale de Busan ; à la Bienniale de Riga ; au Steirischer Herbst, Graz...

 

www.henrikenaumann.com