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Unheimlich

Dike Blair, Marcel Dinahet, Christophe Berdaguer et Marie Péjus, Ricci Albenda, Véronique Joumard, Didier Marcel.

Du Samedi 28 Juin au Dimanche 28 Septembre 2003


Ancien lieu de culte à présent centre d'art, la Synagogue de Delme a pour caractéristique son architecture orientalisante, qui avait pour vocation de rappeler les lointaines origines de la communauté juive, au coeur de ce village-rue lorrain.

La Synagogue instaure de ce fait une relation complexe à son environnement, en lui étant à la fois intégrée et absolument distincte; l'actuelle fonction du lieu, et les usages liés à la présentation des oeuvres ont progressivement amené l'intérieur de la synagogue à couvrir ses murs et sols de blanc, cette blancheur opérant ainsi une seconde rupture.

Le projet à l'origine de cette exposition était de faire écho à cette "étrangeté" architecturale, en questionnant la nature et les limites de la familiarité que chacun peut entretenir avec son environnement; non pas par une investigation de ce qui appartiendrait à un système de références culturelles, et ce qui ne lui appartiendrait pas, mais plutôt à travers un questionnement du cognitif et du perceptif dans leurs mécanismes élémentaires.

Le terme allemand Unheimlich, exploité souvent dans sa langue originelle car il échappe remarquablement à toute tentative de traduction, désigne par la négative cette familiarité aux choses - Heim désignant le foyer, l'intime, le connu, sans toutefois revêtir une connotation familiale.

Les artistes réunis poursuivent individuellement des projets bien distincts, mais ces oeuvres ont en commun une remise en question de cette familiarité, et de cette connaissance première du monde : limites du corps et du mental, limites entre réalité et fiction ou limites de l'espace qui nous entoure sont le lieu privilégié de cette connaissance, et donc du basculement susceptible de s'opérer.

L'étage supérieur accueille la "plate forme anesthésique" de Christophe Berdaguer et Marie Péjus. Entièrement blanc, cet environnement aurait pour vocation d'anesthésier le spectateur-visiteur, en l'occurrence projeté dans une condition à laquelle il ne s'attend guère, celle du "patient". Le premier espace, où trois aquariums suspendus donnent à voir trois poissons isolés - poissons combattants à l'agressivité découragée du fait de la solitude - constitue un accès à quatre espaces de repos, voire de désactivation. Séparés par des sas ronds et blancs, qui ne sont pas sans rappeler quelque version seventies de la science-fiction.

Ces espaces proposent au visiteur de s'allonger sur des matelas de ouate épaisse d'où émane un battement sourd, évoquant directement une pulsation cardiaque, et sur lesquels sont disposées diverses substances anesthésiantes dans des bulles transparentes.

Potentiellement fonctionnel, cet espace rejoint de nombreux projets antérieurs de ces artistes, où l'architecture procède comme de curieuses "extensions du moi", en oscillant entre biologie et artifice, entre tangibilité et imaginaire.

L'environnement semble à la fois toxique et curatif, victime comme nous d'une sorte de perméabilité indésirable entre corps et architecture.

C'est une perméabilité semblable, mais cette fois entre espace réel et espace fictionnel, que Ricci Albenda instaure par ses "Portails", sortes d'empreintes évoquant une présence qui aurait surgit dans l'espace d'exposition ou s'en serait rétractée, et qui se serait figée dans un mouvement subreptice. Cet état entre-deux se trouve renforcé par la tension entre gonflements organiques et netteté des arêtes et des angles, par la rupture qu'elles opèrent avec la régularité orthogonale des espaces d'exposition. L'irréprochable précision, la surface immaculée, la fixité de cet "autre" ainsi rendu présent dans l'espace d'exposition, agit comme un état de perfection numérique piégé par le réel.

Les gouaches de Dike Blair figurent des espaces réels, photographiés préalablement. Leur double statut, pictural et photographique, les font osciller entre la documentation d'un instant, et le temps étiré qui a été nécessaire à leur méticuleuse exécution. Malgré la diversité des sujets représentés, ces peintures ont une atmosphère toujours identique, à la fois familière et absolument lointaine : intérieurs d'hôtels en attente de leurs occupants, ciels sans qualités aperçus à travers la vitre d'un train, ces images fonctionnent comme des mémoires probables de non-lieux communs.

Elles rejoignent en ce sens la vidéo de Marcel Dinahet, "paysage frotté", où ce qui est donné à voir est un horizon sur une baie. Mais au-delà de la seule vision, et à l'inverse de la contemplation romantique du lointain, le regard posé sur la mer est le fruit des mouvement du corps : l'image tourne sur elle-même, à mesure que le corps s'épuise dans ce mouvement rotatif. S'en dégage une sensation paradoxale d'enfermement dans l'horizon, sensation semblable à celle suggérée par les oeuvres de Didier Marcel.

Quatre moulages de troncs d'arbres, en latex colorés, désolidarisés du sol et montés sur des socles en inox tournent lentement sur eux-mêmes comme pour simultanément exciter et freiner la convoitise. Les couleurs guimauve et l'apparente mollesse des matières, la mise en scène de ces quatre échantillons d'arbres solitaires dans l'espace d'exposition, achèvent d'extraire ces troncs de leur lointaine origine naturelle pour évoquer davantage un salon de l'auto qu'une clairière. Elément d'un paysage disloqué et inversé, l'oeuvre rend problématique la question de notre point de vue, et sa relativité à la fois géographique et culturelle.

A la déstabilisation opérée par les oeuvres de Marcel Dinahet et Didier Marcel fait écho celle, plus abstraite, provoquée par les oeuvres de Véronique Joumard. Ces miroirs occultant la vision frontale au profit d'une vision strictement latérale, appellent le visiteur à se déplacer à la recherche de son propre reflet, dans une quête à l'échec programmé. Les conditions de l'apparition semblent décalées, comme pour attirer notre attention vers notre entourage, légèrement revêtu pour l'occasion d'un filtre quasi cinématographique; la réalité des choses se reflète dans la distance d'un écran, apparaît et disparaît au gré des mouvements du spectateur. Celui qui regarde voit sa présence évacuée un moment du monde des images au profit d'une vague silhouette, d'une ombre aux contours subtilement irisés, ou d'une sorte de brume.

Comme dans de nombreuses oeuvres de Véronique Joumard, ces miroirs instaurent un va-et-vient entre jeux de lumières et jeux d'apparitions, comme pour nous rappeler que la lumière est la condition première de l'apparition des choses, et donnent à expérimenter un état indiciel de notre propre présence, intrusion soudaine de la disparition comme preuve fragile de l'existence. A l'instar des autres oeuvres de cette exposition, ces miroirs déçoivent un instant les certitudes qui régissent notre rapport au monde, comme une simple invitation au doute.

 

Ricci Albenda vit et travaille à Brooklyn. Formation : BFA, Rhode Island school of design. 

The Moderns, Castello di Rivoli, Turin, 2002. From the Observatory, Paula Cooper Gallery, 2002. Tesseract, Andrew Kreps Gallery, NYC (2001). Projects 74, Moma, NYC (2001). Casino 2001, SMAK, Gent. 

Christophe Berdaguer et Marie Péjus vivent et travaillent à Marseille. 

2003 : Chapelle St Gaudens. Le parvis, Ibos. Belluard Bollwerk international, Fribourg, Suisse. Subréel, Musée d'art contemporain, Marseille. Micro-territoires, Chapelle Saint-Jacques, Saint-Gaudens. Ouverture, Palais de Tokyo, Paris. 2002 :Locked-chamber (2), FRI-ART, Fribourg, Suisse. Traumathèque, BF15, Lyon. 2001 : Zone désir, Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur, Marseille. Locked-chamber (1), Brakke Grond, Amsterdam. Odyssée de l'espace, Ateliers d'artistes, Marseille. 1999 : Human-pop-corn-project, Galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois, Paris. 1997 : Berdaguer Péjus, Villa Arson, Nice. 

Dike Blair vit et travaille à New York. 

2002 : New Hotels for Global Nomads. Cooper-Hewitt National Design Museum, NY . 2001. Feature, Inc., New York, NY . Works on Paper, Los Angeles, CA 2000 : Compression (curated by Tim Griffin), Feigen, NY . Au-delà du spectacle (expanded version of Let's Entertain), Centre Georges Pompidou, Paris. Not a. Lear, Torch Gallery, Amsterdam. 1998 Charleston Heights Art Center, Las Vegas, NV 1995 Galerie Hubert Winter, Vienna, Austria 

Marcel Dinahet vit et travaille à Rennes. 

2002 : Biennale d'art contemporain, Enghein-les-bains. 2001 : Le Quartier, centre d'art contemporain, Quimper, Niveaux zéro, Institut français d'Ecosse, Edinbourgh. Bambou Curtain Studio, Taipei, estuaire du fleuve, Taiwan 2000 : Les Flottaisons, Le Grand Café, Saint-Nazaire et galerie Le Sous-sol, Paris. Centre d'art de Nicosie, Chypre 1998 : A fleur d'eau, La Villa de Noailles, Hyères, le fort Napoléon, La Seyne-sur-mer. Les Finistères, Newlyn Art Gallery, Cornwall, Royaume-Uni 

Véronique Joumard vit et travaille à Paris.  

2003 : Des voisinages, Le Plateau, Paris. Slots, Liestal, Suisse. Galerie cent8, Paris. 2002 : Le Parvis, Centre d'Art Contemporain, Tarbes. Objets de réflexion, Le Plateau, Frac Ile de France, Paris. Les heures claires, Villa Savoye, Poissy. 2001 : Shizuoka stadium ecopa, Fukuroi city, Japon, organisé par Art Front Gallery, La première Rue, Cité Radieuse Le Corbusier. Rendez-vous, Smack Melon, Brooklyn, USA. Au fur et à mesure, Espace de l'Art Concret, Château de Mouans-Sartoux, une exposition de la collection de Françoise et Jean-Philippe Billarant. 

Didier Marcel vit et travaille à Dijon. 

2003 : Biennale de Lyon ; La salle de Bains, Lyon. Galerie Michel Rein, Paris. 2000 : CRAC Sète, Musée de Dôle. 1999 : Villa Arson, Nice; Centre d'art de Vassivière en limousin. Domaine de Kerguehennec, Bignan.