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Superpositions des expériences. La découverte de la forêt amazonienne : la mousse a pris possession des lieux se logeant jusqu’aux feuilles des arbres. Des fourmis grimpent sur le corps parfumé des humains. Se frotter avec des herbes pour donner l’illusion d’être végétal. Plus tard, parcourir des forêts mosellanes et écouter un bryologue raconter sa conception de l’espace, l’industrialisation et le commerce brutal de la nature. Ramasser des champignons après que la pluie soit tombée. Jeux de transparence, collages et pliages, une flore stylisée apparaît et disparaît en regard d’un moment de suspens en noir et blanc.
Le point de départ du travail d’Éléonore False est l’image. Observée, extraite, classée. Découpée, agrandie, décolorée, superposée, juxtaposée, pliée, renversée, inversée. Observée, oubliée, retrouvée. Grâce à un ensemble de gestes, elle lui propose d’exister autrement la libérant de son contexte originel, historique et symbolique. Elle s’empare de sa matérialité, de ses motifs, trames et couleurs. Inévitablement certaines images se manifestent à la mémoire avec insistance, comme pour demander l’émancipation de leur planéité — un rappel de leur racine imago/imagines, masques funéraires antiques permettant aux défunts d’être présents lors des processions à travers l’empreinte à la cire de leurs visages.
Images glanées de champignons rares sur papier glacé. Travailler avec un souffleur de verre pour les réinterpréter sans chercher la copie ou la fonctionnalité. Les techniques de fabrication artisanales : tissage, vannerie, raku, sont choisies par l’artiste pour leur capacité de traduction et lui inspirent la recherche de typologies d’images particulières. Chauffer, souffler, tourner, souffler, tourner, ciseler, sabler. Le savoir-faire verrier évoque l’esthétique organique, les excroissances et les courbes étranges des russules, pézizes ou trémelles. Si l’analogie entre le corps et la nature est évidente, la forme produite est solitaire, arrachée à son socle mnémonique, réouverte.
Palais de la mémoire. Les sculptures et les installations sont les éléments d’un paysage en construction. Elles dialoguent entre elles sous de multiples combinaisons pour retrouver ensuite leur mode fragmentaire, telles une métonymie : la partie pour le tout. Novalis écrit dans Fragments : « Notre corps est une partie du monde, ou pour mieux dire, un membre. Il exprime déjà l’autonomie, l’analogie avec le tout – bref la notion de microcosme. Il fait que ce membre corresponde à l’ensemble. Il fait que le tout corresponde à ce membre. » Dans la pratique d’Éléonore False, les effets sont indirects, induits par le corps de l’autre, celui qui à son tour va observer les formes produites, s’en emparer, les oublier, les retrouver. Le regardeur est invité à une conversation silencieuse et au déplacement. Evoquant à la fois l’errance et le rêve, les images laissent les associations et les interactions agir. Une allégorie romantique soumise à d’éternels retours. L’infini d’un processus circulaire de contemplation et d’oubli. Un perpétuel inachèvement promesse d’espaces et de transgressions.
Marie Bechetoille
Les œuvres en verre ont été produites avec le soutien du CIAV - Centre International d'Art Verrier de Meisenthal.
Le programme de résidence d’artistes est organisé en collaboration avec le Parc Naturel Régional de Lorraine et la commune de Lindre-Basse.
Éléonore False (1987) est une artiste française, diplômée de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris et d'Olivier de Serres à Paris. En 2012, elle a passé plusieurs mois à la Fondation Alvarez Armando Pentaedo à Sao Paulo, avant d’effectuer des résidences à la Source en 2013, puis à Triangle France à Marseille en 2014. En 2016, elle a effectué un voyage de recherche et de production de tissages au Mexique. Elle a participé à plusieurs expositions collectives, notamment Ne trébuchez pas sur le fil...!, par Triangle France à Paris, Scroll infini au CAC La Galerie de Noisy-le-Sec, de leur temps à l’IAC, Villeurbanne, Cool Memories à l'espace Occidental Temporary ou encore Le nouveau monde industriel aux Moulins / Galleria Continua. Dans le cadre d’expositions personnelles, elle a également investit la Project room du Musée régional d'art contemporain de Sérignan, Il suffit de son bras soulevé pour arrêter et faire reculer le soleil et le Belvédère du Palais des Beaux-Arts de Paris, avec l’exposition Quoi cela ne s’était pas encore matérialisé en mots. En 2016, elle a bénéficié de plusieurs expositions personnelles, NO DIVISION NO CUT au Musée expérimental El Eco à Mexico, Draw my breath à l’espace d’Art Glassbox, ainsi qu'Open room, om-thé-tue-eint-agit au Kunstverein Hannover en Allemagne.