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Il y a 150 à 200 millions d’années, pendant la période du Jurassique, les continents et les mers n’occupaient pas la même place qu’aujourd’hui. La Lorraine se situait alors à l’emplacement actuel du Sahara, dans les marges peu profondes d’un océan qu’on a nommé la Téthys, près de la Pangée, le continent unique de cette époque. Le paysage lorrain était une mer chaude et peu profonde, parsemée d’îlots coralliens d’une grande richesse biologique.
Une mer perdue et un soleil impétueux, les deux personnages principaux d’un récit prenant place dans la commune de Delme. Matteo Rubbi s’est intéressé au territoire du Saulnois et a voulu le recréer sous sa version préhistorique, alors qu’il était recouvert par la mer chaude fréquentée par d’étranges poissons et oiseaux. Voyages dans la mer perdue est une exposition conçue et développée in situ dans l’espace du centre d’art contemporain – la synagogue de Delme, à travers une série d’ateliers impliquant la population de la ville. Les projets de Matteo Rubbi sont inspirés par les contextes et les personnes qu’il rencontre lors de ses voyages. Il les rassemble à l’occasion de workshops, de déjeuners ou de promenades nocturnes. L’Histoire et les mythologies sont des prétextes à réunir, partager et recréer du commun. À Delme et ses alentours, c’est avec la participation des écoles, des associations, des médiathèques et des foyers ruraux, qu’il développe son projet et en collaboration avec d’autres artistes. Les participants se réapproprient une histoire locale sous la forme d’une constellation de gestes et de regards, de dessins et de sons. L’exposition devient progressivement un lieu de métamorphoses et de fictions mettant en scène des animaux fantastiques.
Qu’il s’agisse de raconter la création des univers, comprendre la théorie du Tout ou la classification des éléments chimiques, le travail de Matteo Rubbi propose une navigation entre le micro et le macro, l’infiniment petit et l’infiniment grand. Il aime créer des rencontres impossibles et fait surgir le merveilleux de la banalité. Jouant avec l’interpolation temporelle, le passé soudain réapparaît afin que le futur devienne terriblement proche. Ce retour vers l’originel n’est jamais nostalgique puisqu’il provoque une connexion du monde contemporain avec d’autres réalités et utilise la mise en perspective afin de mieux contredire certaines frontières figées : le soleil est un ballon de basket, Pluton un grain de sable et Vénus un pépin de pomme*. La dynamique festive et participative des projets prend forme pour donner à voir l’invisible, le disparu, le lointain. Par l’utilisation de matériaux simples et par l’implication collective, il convoque des contrées lointaines parfois difficiles à imaginer. Pourtant tout est réel ou l’a été, et c’est bien à cette irréalité présumée que l’artiste répond par l’action. Réinventer, reconstituer, recréer des origines offre de nouvelles visions de notre présent.
Du manifeste scientifique au roman d’aventure, la dimension narrative de l’œuvre de Matteo Rubbi s’inscrit dans le quotidien et laisse à chacun la possibilité d’inventer des règles de jeux inexistants, de personnifier les planètes du système solaire, de reconstituer un bateau historique et de composer un décor cosmique. Comme l’explique l’un des personnages de Micromégas : « Notre soleil tire sur le rouge […] et nous avons trente-neuf couleurs primitives. Il n’y a pas un soleil, parmi tous ceux dont j’ai approché, qui se ressemble, comme chez vous il n’y a pas un visage qui ne soit différent de tous les autres**. » Avec une énergie solaire, Matteo Rubbi rassemble des espaces imaginaires et impossibles où le regardeur est invité à prendre place, l’utopie et l’hétérotopie se retrouvent liées. Mais si le rayonnement des infimes révolutions engendrées n’est pas toujours visible, les voyages qu’il propose manifestent la possibilité de produire collectivement des cosmogonies singulières, à l’image d’une mer et d’un soleil réunis, d’une éternité retrouvée.
Marie Bechetoille
* Matteo Rubbi, Planetario, 2010 - 2014.
** Voltaire, Micromégas, L'Ingénu, coll. « Folio classique », Gallimard, 1979, p. 22.
Exposition en collaboration avec l'école élémentaire Joseph Nicolas de Delme, l'école maternelle Le Blé en Herbe de Delme, le Collège André Malraux de Delme, le Lycée Agricole de Château-Salins, la médiathèque de Delme, le Foyer Rural de Delme, GEM L'Albatros, et avec les artistes : Morgane Britscher, Alain Colardelle, Derek Di Fabio, Formes vives, Anaïs Fusaro & Andrea Rossi, Edna Gee, Isa Griese, Louise Hervé & Chloé Maillet, Francesco Medda, Alek O. & Santo Tolone, Emiliana Sabiu, Carlo Spiga, et l'association Cherimus.
Né en 1980. Vit et travaille à Milan.
Matteo Rubbi est diplômé en 2004 des Beaux-Arts de l’Académie de Brera à Milan. En 2007, il confonde Cherimus, une association artistique basée en Sardaigne qui créée de nouvelles relations entre le monde de l’art contemporain et des initiatives régionales. En 2009, il a participé au programme de résidence Le Pavillon du Palais de Tokyo. En 2012 il a été l’artiste sélectionné pour la résidence ASU Art Museum, Phoenix aux États-Unis. Il a remporté la huitième session du Furla Prize en 2011 pour « sa capacité à interagir avec les spectateurs et créer de nouvelles relations entre l’espace d’exposition et l’espace public dans un esprit d’engagement généreux. Son travail implique différents domaines culturels à la fois d’un point de vue conceptuel et matériel et révèle un sens aigu pour l’aventure expérimentale […] ». En 2015, il a été choisi pour le Lucas Artists Program Visual Arts Fellowship Award et participera au programme de résidence d'artiste au centre culturel Montalvo, Californie. En 2016, il a été sélectionné pour créer une oeuvre d'art à Milan pour le premier parc public consacré à l'art contemporain (ArtLine). Il travaille actuellement avec Cherimus sur Ciak! Kibera, un projet culturel commun entre Sulcis (Sardaigne) et Kibera (Nairobi, Kenya).
Il a présenté des expositions personnelles dans des institutions comme la Fondation Querini Stampalia, Venice; GAMeC, Bergamo ; Combine Studios ASU Art Museum, Phoenix. Il a participé à des expositions collective à la Fondazione Sandretto Re Rebaudengo, Turin ; Palais de Tokyo, Paris ; CNAC Le Magasin, Grenoble ; PAC, Milan ; GAMeC, Bergamo ; GAM, Milan ; Fondazione Arnaldo Pomodoro, Milan ; MAN, Nuoro ; Isola Art Center, Milan, et dans plusieurs galeries dont la Galerie Perrotin, Paris ; Annette Gelink, Amsterdam ; Marianne Boesky, New York ; Limoncello Gallery, Londres. Il est représenté depuis 2008 par Studio Guenzani Gallery à Milan.
http://www.matteorubbi.info/ - http://www.studioguenzani.it/ - http://www.cherimus.net/